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15 avril 2009 3 15 /04 /avril /2009 17:27

J’ai reçu 5 réponses.

 

Le narquois admiratif :

 

Ah ! Toujours soucieux de laisser une trace dans la pierre de ce que vit le monde de l’Aikibudo !

30-40-50… je crains malheureusement de ne pas aller jusque-là ! Quoique… à ma modeste échelle, ça fera 20 ans l’année prochaine que je suis ceinture noire ! Ça vous prend sans que vous vous en rendiez compte !

On y vient pour apprendre à se battre, se défendre, pour se faire des biscotos, pour l’hygiène, pour y rencontrer l’âme sœur, pour canaliser son énergie… et plouf, on tombe dedans, comme une espèce de drogue qui, bien que moins destructrice que le moindre petit pétard, vous rend accro, malgré vous. C’est ce qu’on appelle la logique de l’action : on oublie ce pour quoi on était venu et on reste parce qu’on est pris à son propre jeu.

Ce jeu est aussi riche que la vie : amitié, trahisons, fâcheries, retrouvailles, joies, bonheur, malheur, enthousiasme, doute et parfois même bonheur. On oublie juste parfois qu’il s’agit d’un jeu, trop pris, justement dans ce jeu… alors on prend du recul, on se dit que c’est parfois puéril, enfantin, qu’on y met beaucoup d’énergie pour ce qui n’est, finalement, que très futile et… badaboum, au détour d’un stage ou d’un cours qui a vraiment marché, on replonge et on a envie de bouffer Musashi, de faire la nique à Takeda et on se prend pour… jusqu’à ce que… aïe ! Des poignets fragiles, un dos endolori ou un élève en qui on mettait tant d’espoir disparaisse. Alors on respire un coup, on se rappelle, à nouveau, qu’il ne s’agit que d’une partie de voltige… jusqu’à ce que hop… on replonge.

C’est très futile, mais c’est la vie. Malheur à celui qui ne s’est jamais pris à aucun jeu, celui de l’art (littéraire, manuel, pictural ou martial)… car sans ce jeu de dupes, rien de beau n’existerait vraiment sur terre.

J’ai donc profondément d’admiration pour ceux qui, depuis des décennies, pratiquent cette brasse coulée qui nous emporte nulle part, par simple passion, comme des gamins… et si après tout, pour nous tous, simples mortels, ce n’était que ça, le vrai sens de l’existence… réapprendre à jouer ?

À croire que ça nous rend juste un peu plus humains !

Bises

C.Bobashi.G.

 

Le visionnaire humoriste :

 

Bon.

En premier lieu, merci de m'inclure dans votre demande d'idées. Voici ce que j'arrive à pondre dans un délai que je me fixe très court n'ayant pas de date limite. Un docu-fiction à la Philip  K. Dick. J'espère que c'est pas trop con à votre goût mais qui suis-je vraiment pour imaginer ce que représente 50 ans de pratique? Je m'en remets à vous, votre bon jugement et votre bonne humeur habituelle!

Bonne semaine à vous.

MGL

 

Le sens et le mythe de la ceinture noire : Une rétrospective paléochronique à rebrousse-temps de mon futur antérieur passage de grade,  du quinquagénaire de ma magnificence et de mon ascension au titre de Suprême Kickeur De Culs.

Cinquante ans. Toutes ces années d'entraînement m'amènent à réfléchir sur le sens de la vie. La mienne en particulier. Pourquoi donc ai-je décidé de poursuivre dans la Voie?

Certes, j'y étais destiné, diront certains. Avec un nom comme le mien, Lavoie, je ne pouvais faire autrement que de suivre la voie déjà toute tracée devant moi. Dō. Je me souviens encore de ce premier Dan. Quel con j'étais.

 

 

Le jeune Yudansha insouciant que j'étais.

 

Ça ne faisait pas encore un mois que je pouvais porter le Hakama qu'on me vouvoyait déjà. Au début je croyais simplement que mes cheveux gris... Mais non. S'installait déjà cette fameuse aura dont les kyus sont si friands à s'imaginer.

 

 

Mes quarante ans de pratique

 

Au fil du temps j'ai appris à ignorer les groupies. Plus précisément, à comprendre cette passion que d'admirer tant d'années de pratique. J'arrive à en rire maintenant. Mais bordel que j'ai dû faire des efforts pour qu'ils arrêtent de me cirer les pompes. Pire encore, me convaincre de les y arrêter.

 

 

Mon quarante-sixième anniversaire de pratique

 

Tiens. Ça me rappelle cette histoire que j'ai vécue avec ce bon vieux Daniel alors que j'étais Yudansha tout frais.  Une journée de ski toute plaisante avec lui, Sylvain et ce boulet qu'était Gustavo en skis. A-t-on idée d'inviter un 6e kyu de ski quand nos heures sont comptées? Alors qu'on finissait une belle balade en duo dans une piste experte, voilà nos deux lurons qui, du haut de leur gondole passante, nous apostrophent. « Mais comment nous ont-ils reconnus? » me demanda Maître Dubreuil. « Simple, lui répondis-je, vous êtes le seul sixième dan sur la piste ! ». Quel con j'étais. Il me répondit en souriant : « Ah oui, cette auréole ! ».*

 

 

Suprême kickeur de culs

 

Me voilà donc après cinquante ans de pratique. J'ai peine à imaginer que j'y suis. Mais comment les vieux maîtres avant moi y sont-ils parvenus? Qu'étaient leurs réactions et leur vision des choses? Eux qui ont tracé devant nous cette voie? Aujourd'hui je me vois monté au premier plan, mais eux, ils étaient les premiers de cette famille. Je vois ces jeunes pratiquants, lors de stages, qui me regardent et m'admirent. Un jour ils réaliseront qu'en fait, je ne suis pas leur guru de secte. Quoique aujourd’hui je réalise que j'aurais pu sauver une sacrée somme en impôts. Mais bon. La voie à suivre est celle de l'harmonie. Du plaisir de la pratique et après un temps, au plaisir de retransmettre ce savoir et cette joie de vivre. Parce que si, même aux yeux de certains, je suis ce suprême kickeur de culs fantasmagorique, je ne serai en réalité que ce dont la prospérité se souviendra. Et si j'arrive à n’être qu'une partie des Anciens de notre Art, alors j'aurai accomplis quelque chose de bien.

 

*histoire véridique

 

Le convaincu objectif :

 

Cher André,

S'interroger présente un risque ! Tant d'années pour une activité non productive, ce choix était il judicieux?
Mais d'abord avons-nous choisi? Dire qu'il nous a été donné de rencontrer cette discipline serait plus juste. Nous avons seulement persévéré pour ne pas dire que nous nous sommes entêtés, probablement parce que nous y avons trouvé du plaisir, de l'intérêt, la perspective combien vaine d'être fort. C'est ce que je pense parfois quand le ciel est gris comme souvent dans notre Normandie.
Quand le ciel est bleu, ce qui est plus rare, je revois toute les rencontres que j'ai pu faire, les instants de pure grâce de la pratique, le plaisir d'apprendre aux autres et de les voir progresser et j'oublie l'arthrose, le temps perdu (qui aurait été perdu de toute façon) et je me dis : quelle chance j'ai eue !
Je ne sais si nous oscillons tous entre ces deux sentiments contraires, mais si c'était à refaire je crois que je recommencerais.
Donc 50, 46 ou 40 ans, 30 pour ce qui me concerne, il n'y a qu'un événement qui pourra nous arrêter!

Avec toutes mes amitiés.
E.L.

 

Le missionné serein :

 

Réflexions : que représentent 45 années de port de la ceinture noire pour D.T. ?

 

Une grande responsabilité, tout d’abord, envers les autres personnes. Pour les jeunes adeptes en Aïkibudo et/ou en judo qui seront en devenir d’accès au port de la ceinture noire, un jour. J’ai une «mission», le terme est peut-être «pédant» mais c’est montrer la voie de l’art martial tant au dojo qu’à l’extérieur du dojo.

 

Cette voie martiale, d’une part avec tout son cortège d’étiquettes, mais également de valeurs de la vie dont chaque humain devrait s’inspirer pour devenir meilleurs, tel que le respect de soi et d’autrui, le contrôle de soi, la collaboration mutuelle, la recherche de l’harmonie, service et disponibilité auprès des autres, etc.

 

Quel bonheur de pouvoir ensuite retrouver mettre cet art martial mais aussi d’apporter et/ou de soutenir, auprès des adeptes, ces valeurs morales, ses règles et participer à la formation globale de la personne.

 

L’objectif, pour tout adepte des arts martiaux, est d’obtenir cette ceinture noire ! La route est difficile pour y arriver mais obtenir cette «obi» noire, quelle euphorie pour celui qui l’a mérité ! Quel bond nous venons de faire tant au plan technique que corporel, mais également sur le plan moral…et quelles responsabilités nous avons subitement auprès des autres et de soi même ; autres qu’il faut aider, mais soi aussi et que les autres marches sont hautes pour progresser, progresser encore et toujours !

Car avec l’obtention de la ceinture, on commence à apprendre l’art martial que l’on pratique, pour moi, c’est une grande école de la vie que nous apportent les arts martiaux ! Les portes sont nombreuses, la ceinture noire Sho-Dan et par la suite, les nombreuses autres !

 

Que de plaisir au bout de 45 ans de pratique, l’art martial apporte santé et sérénité mais aussi la joie de pouvoir pratiquer avec des personnes partageant le même idéal.

 

D.T.

6ème dan Judo

3ème dan Aïkibudo

 

La voyageuse inspirée :

 

Nos impressions, de pratiquants de tous niveaux, horizons et lieux différents, de professeur … Ce que cela représente pour nous,  « 40, 46, 50 années de ceinture noire » ?

 

Tout d’abord, au présent. Comme disent les « jeun’s » : RESPECT !

Alain FLOQUET a passé son 1er dan il y a un demi-siècle :

50 ans de CN ???!!!

- ça doit être la « Bodhéité » absolue… et il y a du Bouddha qui sommeille en Sensei.

- avec toujours les yeux et le cœur d’un enfant …  Bon anniversaire, Sensei !

Alain ROINEL      

46 ans de CN ?... ça doit être ça, sûrement,  le début de la sagesse…

Claude JALBERT, Edmond ROYO, Gérard CLERIN, André TELLIER

40 ans de CN ?

- un bon signe de vitalité de l’Aïkibudo

 

Et au futur ?  Si l’on pouvait se projeter en avant, avec nos présupposés actuels  d’élèves sur  ce que peut être ce « niveau-là », il y aurait peut-être bien cette petite chanson  qui me trotte dans la tête de Jean Gabin, Je sais. [Vous  vous en souvenez ?] et qui disait quelque chose comme « à 20 ans, je savais tout, j’avais tout compris et… à 30 ; ça y est, je sais…  à 40,….à  50 ans…   et aujourd’hui, je sais que je ne sais rien, mais ça au moins, je le sais. » Ce qui est déjà en soi, le signe d’une pratique bien conduite. Pensez à nous, Honorables Anciens, avec la même bonté et compassion … à nous tou(te)s, ces élèves qui, sur la longue route martiale, continuons à pédaler… à pédaler … à pédaler… avec nos croyances, nos certitudes, nos illusions, nos erreurs, nos faux-pas…notre spontanéité aussi, nos (brefs) instants de lucidité, qui retombent dans la facilité, les mauvaises techniques, les nouveaux départs. Vos paroles sont précieuses. Dans la nuit, elles éclairent notre lanterne, guident nos pas sur la voie… D’autant que vos parcours sont singuliers et témoignent d’un engagement sans faille dans l’Aïkibudo.

 

 Le passé… Imaginez un saut dans le passé de « 40, 46, 50 années de ceinture noire »…

- on prendrait sans hésiter la machine à remonter le temps avec vous,  avec un billet pour le Dôjô de Me Minoru MOCHIZUKI …

 

L’Aïkibudo des origines : les aventuriers d’un autre monde.

- Mais comment peut-on imaginer aujourd’hui ce que vous avez connu, ce Japon des années 50-60, très peu fréquenté par les étrangers – en dehors des forces américaines, et aussi quelques rares pionniers français qui comme vous, sont partis en quête de ces techniques martiales mystérieuses ? A l’heure 2009 de la mondialisation et de l’uniformisation des pratiques culturelles, du jeunisme, du téléphone portable (qui sonne dans les « Clubs ») et de la révolution numérique (vous saurez-tout-sur-internet-com),  du sport de masse et de la consommation, a-t-on encore une chance de percevoir cette atmosphère des origines, de partager cette même émulation, les hivers de froidure et de courants d’air dans le vieux club de Shizuoka ;  de goûter à pareille source vive ? Je n’en suis pas si sûre…Les Maîtres se font  rares, et ceux de « l’ombre » sont bien cachés. Le pire, pour nous, c’est peut-être de passer à côté sans les voir… perdus que nous sommes dans la course au temps et à  l’échalote…

 

Merci de nous offrir encore et pour longtemps plus que de simples lieux d’entraînement, ces havres de paix et de recherche tant martiale que spirituelle que sont les vrais Dôjôs, ces précieuses techniques de l’Aïkibudo, qui font partie du patrimoine vivant de l’humanité.

Et puis, témoigner…encore et toujours,  Sensei et Honorables Anciens, parler encore plus de toutes ces expériences. Offrir du rêve et du mythe pour inviter les jeunes générations à renouer avec l’aventure de la pratique martiale, celui du voyage initiatique, de l’apprentissage de la vie, de l’amitié, de la fraternité. Notre époque matérialiste en a, je crois, terriblement besoin.

 

P.B.

1er dan Aïkibudo
 

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15 avril 2009 3 15 /04 /avril /2009 17:09



 

Je me suis initié aux mystères du Ju Jutsu il y a une cinquantaine d’années, en suivant les cours (par correspondance, il fallait le faire...) de Dynam Ju Jutsu. Ça fera 45 ans, au début du mois de septembre, que j’ai osé pousser la porte d’un club de Judo, prendre ma première licence et m’initier au judo puis au Karate et enfin à l’Aïkido Yoseikan.  

Le 23 mars 2009, j’ai « fêté » le quarantième anniversaire de mon accession au droit de porter la ceinture noire. Alain Roinel recevait le 3ème dan ce même jour, il avait accédé au 1er dan le 27 juin 1963.

Les 8, 9 et 10 mai, l’Aïkibudo va célébrer les cinquante ans de ceinture noire d’Alain Floquet.

Voici la date d’entrée en Shodan des plus anciens de l’École :  

 

  Pas respectueux ? Ils ne sont plus des jouvenceaux, quand même !

 

Je ne voudrais pas avoir l’air trop franco/français et oublier un des plus anciens d’entre nous : Raymond Damblant qui exerce son Art à Montréal. Il a passé son 1er dan d’Aïkido Yoseikan au stage de Royan animé par Charles Sebban en juillet/août 1966. J’étais titulaire d’un très modeste 3ème Kyu. Hiroo Mochizuki était venu faire une visite de courtoisie à la fin de la première période, j’avais eu le privilège de lui servir de Uke, passant de la terreur (allait-il me pulvériser les poignets ?) à l’émerveillement (des techniques passées tout en fluidité !). Ce doit être à l’occasion de sa visite que fut organisé le passage de 1er dan auquel se présentaient le docteur Poli dont j’ai oublié le prénom et Raymond Damblant. J’avais l’impression de voir des géants que je n’osais même pas approcher. Après avoir observé leur prestation, j’avais définitivement remisé aux calendes grecques le projet de fermer un jour mon keikogi avec une ceinture noire. Mythique ceinture noire ! Elle nous paraît si inaccessible, réservée à des êtres d’exception, à des géants, quitte à me répéter. J’y suis pourtant parvenu deux ans et demi plus tard. Et j’ai fait la connaissance de Raymond Damblant à Montréal en 1989. En fait, je suis plus grand que lui.    

 

Que représentent toutes ces années passées sur le tatami à suivre la Voie des Arts Martiaux ? À quoi ça sert de répéter sempiternellement les mêmes gestes, les mêmes enchaînements ? Que sont devenues ces centaines, voire ces milliers de personnes qui nous ont accompagnés pendant quelque temps puis ont changé de chemin ?

En fait, arrivé au crépuscule de mon existence, je ne me pose plus guère de questions. Je ne me pose plus guère ces questions. Je suis pris de boulimie pour ce que j’avais toujours tendance à repousser : le Kata. Je suis épris de liberté. Je refuse les contraintes imposées, je suis assez conscient pour connaître mes limites et contrôler mes pulsions. Mon Aïkibudo est évolutif. C’est un mode d’expression et un moyen de progression.

Pour devenir un interprète convenable avec un instrument de musique, il sera bon que j’aie des notions de solfège, il sera surtout nécessaire que j’acquière la technique. Pour affiner mon jeu, je devrai répéter et encore répéter des arpèges, jusqu’à les dépasser, les oublier, jusqu’à ce que la souffrance ait laissé place à la fluidité...

En fait, je considère que notre pratique correspond à la connaissance et à la compréhension de trois éléments :

- l’histoire : un groupe qui cesse de connaître son histoire disparaît. La connaissance de notre histoire est essentielle à la compréhension de notre Art, à sa survie et à son développement, qu’il s’agisse de la grande histoire événementielle, avec ses grands hommes et ses grands combats, ou de la petite histoire locale avec ces personnages secondaires sans qui la grande histoire n’aurait pas eu lieu.

- la mythologie : quand l’histoire est mal ou pas connue, les membres du groupe rêvent un monde idéalisé, créent des événements mythiques auxquels ils finissent par croire plus qu’aux faits réels... Les rumeurs, les divagations, les ratiocinations deviennent vérités... L’Art devient religion (du latin religere, relire) autrement dit une répétition passive de rites incompréhensibles pour les adeptes mais qu’ils croient nécessaires pour se relier (du latin religare, autre étymologie du mot religion, la préférée des religieux) au grand Maître...

- le vécu : c’est en arpentant physiquement la Voie, en suant, en travaillant avec opiniâtreté qu’on avance, qu’on progresse, pas en se contentant de spéculations intellectuelles ou de se laisser guider par un initié qui nous tient par la main. Ce n’est qu’après avoir maîtrisé son corps qu’il devient possible d’accéder à la spiritualité. C’est le sens des Kata qui ne sont pas chargés de connaissance secrète, comme tendraient à le croire les gens trop crédules, mais qui exigent de ceux qui les pratiquent un polissage permanent jusqu’à approcher la perfection. Et dès qu’on croit atteindre cette perfection, un nouveau détail à améliorer est le point de départ d’un nouveau cycle de polissage... Le but ultime consiste à se détacher de ces enchaînements parfaits pour donner libre cours à son imagination... C’est la nature de l’Aïkibudo qui, évolutif, redonne à l’individu, après des années de pratique assidue et consciencieuse, cette liberté ludique qui est l’apanage de l’enfance.

Il n’est pas nécessaire de croire en la transcendance pour développer sa spiritualité, croire en une divinité n’est pas nécessaire pour se hisser à un niveau de conscience plus élevé. Tout artiste, tout artisan qui cherche à atteindre la perfection dans son Art ou dans son métier, tout ouvrier qui se concentre totalement dans l’exécution de son ouvrage ne peut pas éviter d’être interpellé par des considérations spirituelles.

Et alors, me direz-vous, après tout ce bavardage, 40 ans, 50 ans de ceinture noire, qu’est-ce que ça représente, pour vous ?

Toutes ces années accumulées m’ont graduellement conduit dans le monde des « vieux », des anciens disent ceux qui parlent politiquement correct. J’ai droit à mon petit colis de Noël et je pourrais même participer gratuitement au « banquet des anciens » si j’avais envie de passer une journée avec une bande de vieux radoteurs...

Au Japon, l’éducation étant encore imprégnée de Tradition, le rapport aux personnes âgées est différent. Un jeune pratiquant sait que ce qui lui manque le plus est l’expérience et qu’il la trouvera auprès d’un vieux Maître. Pour compenser la baisse progressive de sa condition physique, le pratiquant chevronné a appris à affiner le sens du « timing », le placement, l’esquive, la fluidité, la précision... Les jeunes Budoka souhaitent emmagasiner des techniques, éprouver leur force, éprouver l’excitation de la compétition... Le vieux Maître peut leur apporter tout autre chose, ce qui ne peut s’acquérir qu’avec l’expérience : les sensations. En s’entraînant avec un ancien, en renonçant à éprouver sa propre force face à un partenaire à la condition physique plus modeste (en principe !), le débutant recueillera tout le bénéfice d’un travail en sensation qui lui apprendra comment utiliser sa force « intelligemment ».

En France, les enseignants dissèquent avec une précision chirurgicale les techniques qu’ils enseignent. Et pourtant, on s’aperçoit qu’il y a autant d’interprétations que de « Maîtres »... Tout n’est qu’un problème de perception. Ce qu’on perçoit n’est pas la réalité mais une reconstitution effectuée par notre cerveau de prédateur : vision en relief dans un angle frontal très étroit, ce qui impose un balayage constant de l’environnement pour élargir ce champ de vision en relief, et une large vision latérale adaptée à la détection des mouvements.

Notre culture de ce début du XXIe siècle est basée sur l’audiovisuel : la lecture s’effectue essentiellement sur écran, de TV ou d’ordinateur. Dans la vraie vie, le regard doit aller chercher l’information, d’où ce balayage décrit plus haut et la vigilance constamment mise en éveil par la vision latérale. Mais dans la vie virtuelle, c’est l’information qui vient au devant. L’écran zoome sur le détail que le spectateur doit remarquer pour s’intéresser à l’intrigue.

L’humain du XXIe siècle risque de perdre sa vision latérale et peut-être sa vision en relief en négligeant ses facultés de balayage... Combien d’élèves zappent pendant les démonstrations. Ils ont besoin d’explications, de précisions... tout de suite oubliées car stockées dans la mémoire à court terme, donc volatiles.

L'époque n'est plus la même et la situation a changé. À l’époque des Sensei, on n'enseignait pas la véritable technique. Occasionnellement, l'espace d'un instant, le Maître la laissait jaillir. Mais il ne donnait jamais d'explication. « Si c'est une chose que vous pouvez voler, alors volez-la ! Si vous réussissez à saisir une chose vous pouvez la garder. » C'était ce type d'enseignement. Il ne disait jamais : « Il faut prendre la main comme cela, on fait comme ceci. » C'est pourquoi chacun a fait des choses différentes. « Essayez de voler ma technique si vous le pouvez! ». C'était sa seule façon d'enseigner. Les gens qui venaient étudier avaient tous des niveaux différents. Ce qu'ils pouvaient voir était différent. C'est pourquoi les techniques sont aujourd'hui si différentes. Ce n'est pas que le Sensei enseignait à chacun des choses différentes mais que les gens ne voyaient pas la même chose en fonction de leur propre niveau, de leurs propres références, de leur culture... (d’après une interview de Kondo Katsuyuki, actuel Soke de Daito Ryu)
 

Cette forme d’enseignement aurait bien du mal à s’imposer à notre approche analytique mais notre méthodologie pédagogique risque de noyer l’essentiel dans un débordement de précisions et de détails. Quarante années d’expérience d’enseignant m’ont appris à expliquer avec précision les bases, ce qui n’est pas encore l’Aïkibudo mais le « B.A.BA », et à faire découvrir par les sensations le mouvement, l’Aïkibudo « évolutif », global.

En fait, toutes ces années à « vivre Aïki » m’ont aidé à acquérir de la fluidité dans mes rapports avec les autres et peut-être aussi plus de « tranchant » quand il s’agit de conclure...

 

J’ai trouvé intéressant de demander à 45 pratiquants de tous niveaux, de tous âges, de toutes origines leur point de vue sur la ceinture noire...

 



>suite de l'article>

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2 avril 2009 4 02 /04 /avril /2009 17:40

De la distance Chika Ma à la distance Ma

 

Bases théoriques

 

Entrée

-          Extérieur

-          Intérieur

Saisie

-          Pronation

-          Supination

Armlock

-          Par-dessus

-          Par-dessous

Projection

-          Irimi

-          Tenkan

Entrée distance Ma

-          Irimi

-          O Irimi

 

Applications

 

Muna Dori distance Chika Ma (concept de Tai Sabaki sans bouger les pieds)

Extérieur + pronation -> Kote Gaeshi, Neji Kote Gaeshi

Intérieur + supination -> Shiho Nage, Tenbin Nage, Kataha Otoshi

Intérieur + pronation -> Kote Kudaki, Robuse, Hiji Kudaki

Extérieur + supination -> Yuki Chigae

Intérieur-> engagement du bras intérieur -> extérieur -> Mukae Daoshi, Hachi Mawashi

Applications en Irimi et Tenkan

 

Ushiro Eri Dori

Extérieur + pronation -> Kote Gaeshi

Extérieur + supination -> Shiho Nage, Tenbin Nage, Kataha Otoshi

Intérieur + pronation -> Kote Kudaki, Robuse, Hiji Kudaki

Intérieur + supination -> Yuki Chigae

Extérieur -> engagement du bras extérieur par dessus -> Mukae Daoshi, Hachi Mawashi

Intérieur -> engagement du bras intérieur par-dessous -> engagement du bras extérieur par dessus -> Mukae Daoshi, Hachi Mawashi

 

Muna Dori distance Ma

Mêmes applications qu’en distance Chika Ma en associant les entrées Irimi et O Irimi avec les applications en Irimi et Tenkan. Projections et immobilisations. Opportunités de Kaeshi Waza en enchaînement et en renversement.

Extérieur + pronation -> armlock par-dessus -> Kote Gaeshi, Neji Kote Gaeshi

Extérieur + supination -> armlock par-dessous -> Yuki Chigae

Intérieur + supination -> Shiho Nage : c’est la main extérieure, celle qui porte l’atémi, qui saisit en premier. L’autre, celle qui esquive, vient en second, en appui.

Intérieur + pronation -> Kote Kudaki : analogie avec l’application précédente

 

Randori Muna Dori (Chika Ma et Ma) et Ushiro Eri Dori

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2 avril 2009 4 02 /04 /avril /2009 17:26

 

Après avoir exploré depuis le début de la saison le concept selon lequel il est a priori possible de faire « tout sur tout », après avoir fait le tri des réponses pertinentes et observé ce qui semble fondamental ou variante, il convient de se reposer sur des bases théoriques délimitant un cadre cohérent.

Je considère que la découverte d’un Art Martial doit d’abord être ludique : nous n’avons pas l’intention de former des G.I’s ni des Marines... Le débutant aura d’abord assez à faire en allant à la découverte de son propre corps, de ses aptitudes, de ses forces et de ses manques. Ensuite, il devra prendre conscience des sensations de son partenaire, avec leurs ressemblances et leurs différences. Tout ceci en effectuant ses premiers pas sur la Voie des Arts Martiaux, en allant à la découverte de techniques, d’un langage qui se situent à mille lieues de sa sphère de communication habituelle.

Le côté ludique de l’apprentissage n’est pas antinomique d’une certaine rigueur, d’une programmation soigneusement dosée à l’aide desquelles le savoir se construit.

Les bases théoriques que je propose se limitent à un simple exercice de classification tout à fait traditionnel :

-         techniques extérieures ou intérieures

-         saisie en pronation ou en supination

-         entrée Irimi ou O Irimi en fonction de la garde choisie par rapport à celle de Uke

-         armlock par-dessus ou par-dessous

-         application de la technique en entrant (forme Irimi) ou en s’effaçant (forme Tenkan)

 

La notion d’entrée intérieure ou extérieure se comprend en fonction du placement à l’entrée par rapport au bras de Uke. Les techniques sont classées en fonction de leur forme fondamentale sachant bien que des exceptions, des variantes sont possibles...

Techniques extérieures : Kote Gaeshi, Yuki Chigae, Mukae Daoshi, Hachi Mawashi...

Techniques intérieures : Shiho Nage, Tenbin Nage, Kote Kudaki, Hiji Kudaki, Robuse, Ura Ude Nage, Kataha Otoshi...

 

Pourquoi se fatiguer avec des bases théoriques ? Ne suffit-il pas de pratiquer ? Notre Art ne sert pas à fabriquer des robots ou des acrobates. C’est le vecteur d’une culture que nous nous engageons à transmettre dès que nous avons pris l’engagement de continuer à progresser sur sa Voie.

Un artiste ne se contente pas d’exprimer son Art : il le comprend, il sait ce qu’il fait et pourquoi il le fait. Il ne vit pas enfermé dans son Art, il est en interaction avec son environnement, avec les autres formes d’Art qui se manifestent dans son Univers.

L’Aïkibudo a atteint une forme d’Universalisme. Il s’est construit sur 3 grands Arts Martiaux Traditionnels qui sont eux-mêmes le produit de syncrétismes... dans la culture du Japon médiéval, bien étrangère à notre culture française du XXIème siècle !

Ces Arts se sont construits de façon pragmatique, empirique puis de façon systématique. Les Maîtres fondateurs n’étaient ni des soudards ni des bretteurs. Ils possédaient une immense culture et un cerveau apte à effectuer des travaux d’analyse et de synthèse. Leur inclination philosophique leur a fourni l’habillage nécessaire à la constitution d’un Art complet et éducatif.

Je prétends que notre Aïkibudo fait partie de ces grands Arts qui ont atteint une dimension universelle. C’est un Art moderne, un Art du XXIème siècle, adapté à la mentalité des humains de ce siècle et habillé de culture et de philosophie typiquement françaises, ce qui n’est pas la moindre de ses originalités.

Bigre ! C’est tout ça que je voulais développer dans mon cours de ce 1er Avril ? Ce n’est même pas une blague et comme d’habitude je n’ai pas réalisé tout ce que j’avais prévu. Je finirai mon exposé théorique, et pratique, au prochain cours...

Et les élèves de Saint Léger ? Quel taux de migraine avaient-ils atteint à la fin du cours ? À priori, le sourire semblait encore généralisé. Pronation, supination, ça pourrait bien en avoir agacé quelques-uns. Non pas parce que ça leur a semblé difficile, au contraire, ces notions ont été comprises. Intellectuellement. Mais le corps, lui, continue à faire ce qu’il a appris. Quoi de plus agaçant que de savoir ce qu’il faut faire et de constater que son corps répond à un conditionnement ?

Ça permet de comprendre que notre but est de devenir assez libres pour nous adapter, devenir aptes à répondre à toute sollicitation même inhabituelle de façon adaptée mais non pas conditionnée. Un petit bagage théorique n’est peut-être pas inutile pour y parvenir.

 

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27 mars 2009 5 27 /03 /mars /2009 19:29

Le club d’Aïkibudo de Caudebec-en-Caux est le plus ancien de la Haute-Normandie. À l’origine de sa création, en 1969, un professeur de Judo, H.C. Lindenman, titulaire du 1er kyu d’Aïkido Yoseikan et qui avait souhaité faire bénéficier ses élèves de cette « nouvelle » discipline.

Je la pratiquais déjà depuis 4 ans à l’E.J.J.L. aujourd’hui disparue. J’avais ouvert le club de Malaunay et j’étais responsable des cours du 3e au 1er kyu à l’E.J.J.L.

Et c’est là que je fis la connaissance d’Alain Gallais qui venait compléter ses connaissances, accompagnés d’un petit groupe de Caudebécais.

Notre premier contact n’avait pas été particulièrement chaleureux, je n’étais peut-être pas d’un abord très facile, à cette époque assez rude où nous étions encore une sorte de pionniers.

Nous avons appris à nous connaître et à nous apprécier. J’ai été associé au développement et à la progression de la section de Caudebec-en-Caux et Alain s’est longtemps impliqué dans l’administration de la Haute-Normandie, depuis notre statut de discipline associée au Judo sous la FFJDA jusqu’à notre indépendance chèrement acquise sous la 2F3A. Mais ceci est une autre histoire qu’il faudra bien raconter : les jeunes générations doivent connaître l’histoire de la discipline qu’ils pratiquent, de la région, du pays où ils vivent. Comment savoir où l’on va si on ne sait pas d’où l’on vient ?

C’est pourquoi, ce jeudi 26 mai, en fin de soirée et sous une pluie battante, je suis arrivé devant le superbe dojo de Caudebec-en-Caux dont peut s’enorgueillir Alain Gallais.

Ces retrouvailles annuelles permettent aux pratiquants de 3 clubs (les autres seraient chaleureusement accueillis s’ils faisaient le déplacement...) de se retrouver, de faire connaissance pour les débutants et de passer un bon moment en souffrant un peu sous la direction d’un vieux Maître pour les plus anciens.

Le vieux Maître a souffert un peu, lui aussi, d’abord en tâchant d’apporter le maximum à un groupe hétérogène, du grand débutant au 5e dan, ensuite en devant contrôler les assauts d’un jeune Yudansha qui a dû prendre la mesure de ce qu’on attend d’un bon Uke. Et il fut, en fin de compte, un excellent Uke.

Les cours que je donne cette année sont élaborés à partir d’un projet de bases théoriques (entrées extérieures et intérieures, saisies en pronation et en supination, techniques portées en Irimi et en Tenkan, passage de la distance Chika Ma à la distance Ma) peut-être un peu austère pour une rencontre annuelle que je conçois sous un aspect plutôt ludique.

J’ai donc opté pour une application du Tanto no Kata dont il serait bon de revoir les bases : rythme, sens de la coupe, angles d’attaque... J’ai déjà développé ce travail dans une fiche technique : « défense contre tanto » (que j’ai revue et corrigée car j’y ai trouvé une erreur en y jetant un coup d’œil en préparant mon cours).

 

Shomen Uchi -> Mae Tobu Nage

Omote Yokomen Uchi -> Mae Hiki Otoshi

Ura Yokomen Uchi -> Ura Ude Nage

Tsuki Chudan -> Ude Kake Mae Hiki Otoshi

 

Pas facile pour un grand débutant ? Pas facile non plus pour des pratiquants bien initiés... Alors... Ensuite, nous passons à la défense contre Tanto à l’aide d’un Tambo.

 

Tsuki Chudan -> Kote Gaeshi

Tsuki Chudan -> Hiji Kudaki

Tsuki Chudan -> Kataha Otoshi (Tambo tenu de la main droite ou de la main gauche)

Omote Yokomen Uchi -> Ura Mae Tobu Nage

Omote Yokomen Uchi -> Shiho Nage

Ura Yokomen Uchi -> Ude Jime

 

Et l’heure et demie qui nous était allouée s’est déjà écoulée. Xavier serait-il allé au Québec ? Après le salut, il a provoqué des applaudissements !

Une petite remarque : nos armes méritent le respect, tout autant que nos partenaires. À la fin du cours, le Tanto et le Tambo se portent à la ceinture et participent au salut. Plutôt que de les jeter dans un coin du tatami...

 

et toujours avec le sourire !

 

 

ça va faire mal ?

 

 

oui, ça fait mal !

 

 

attention, casse-cou !

 

 

même pas mal !

 

 

 

 

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14 mars 2009 6 14 /03 /mars /2009 11:14

 

 

Comme c’est devenu une habitude, ce cours s’appuie sur l’hypothèse selon laquelle il doit être possible de faire n’importe quelle technique sur n’importe quelle attaque, étant considéré comme évident que certaines réponses apportées seront plus pertinentes que d’autres.

D’autre part, les techniques sont systématiquement classées en extérieures ou intérieures, en fonction de l’entrée, cette notion se définissant en fonction de la position de Tori par rapport au bras de Uke au moment de l’entrée.

Ce classement n’est pas absolu, ce n’est pas un dogme : nous avons vu qu’il est possible de placer Kote Gaeshi, technique extérieure, sur Omote Yokomen Uchi et Shiho Nage, technique intérieure, sur Ura Yokomen Uchi...

Dernier élément qui conditionne la technique opportune : la position de la main qui saisit soit en pronation soit en supination. Ainsi, Kote Gaeshi répond à extérieur et pronation. Shiho Nage répond à intérieur et supination. Ouf ! Certains commencent à éprouver une petite migraine qui risque de s’amplifier par la suite puisque nous allons explorer les possibilités d’application de Yuki Chigae qui introduit une notion supplémentaire : la symétrie.

Yuki Chigae est une technique extérieure, Tori saisit avec la main en supination. Si Uke change de côté d’attaque mais que Tori répond de la même façon que précédemment, il peut placer Shiho Nage... Vous suivez ? Ça commence à taper sous la voûte  crânienne ? Résistez encore un peu.

 

Pour échauffer les neurones (le neurone, pour certains, s’il faut les en croire) après avoir terminé l’échauffement musculaire, nous revoyons Kote Gaeshi et Shiho Nage sur Jyunte Dori en distance Chika Ma. Quand une technique est connue, appliquée convenablement, il devient possible de soulever une nouvelle difficulté, de travailler une nouvelle compétence de façon à atteindre un nouveau pallier. Ce travail préparatoire est l’occasion d’appliquer la sensation de Tai Sabaki sur place en travaillant la mobilité des hanches.

 

Ensuite, nous passons à l’étude de Yuki Chigae.

 

Jyunte Dori. Le dégagement place Tori à l’extérieur du bras de Uke. La reprise de la main en supination et le passage sous le bras (Yuki Chigae peut se traduire par « se croiser en route sans se rencontrer ») permettent de placer un Yuki Chigae sommaire. Reste à appliquer les points clés : se mettre en sécurité, déséquilibrer, contrôler (Yuki Chigae fait partie des Hikitate Waza, les techniques de contrôle debout).

 

-          déplacement latéral pour éloigner l’épaule correspondant au bras libre donc dangereux

-          monter le coude au-dessus de l’épaule de façon à empêcher Uke de tourner sur lui-même (opportunité de Kaeshi Waza en renversement)

-          contrôle de la main pouce sur pouce, petit doigt sur petit doigt, la main libre (bras extérieur) contrôle les doigts de Uke et fixe un axe coude/doigts

-          placement du bras de Uke dans « l’axe de la couture du kimono » et rotation de la main saisie vers l’intérieur (l’index haut vise l’œil de Uke...)

 

Yuki Chigae se conclut, pour les débutants ou au début du cours, avec une projection sur l’arrière.

 

Si au lieu de me dégager comme dans le Te Hodoki de base, je m’écarte en oblique arrière en tirant la main de Uke paume vers le sol, je peux la reprendre de ma main libre en supination, pouce sur pouce, petit doigt sur petit doigt, effectuer une rotation vers l’intérieur : opportunité de Kote Kudaki, Robuse... Et si ma main dégagée vient prendre le relais  de l’autre (sans rupture de la saisie) qui, ensuite, vient contrôler les doigts de Uke, j’obtiens... Yuki Chigae. Ce n’est pas une entrée fondamentale, mais c’est possible. De plus, si je prolonge mon action en spirale sur le poignet, je fais plonger Uke vers l’avant : possibilité de chute avant ou d’immobilisation. Pas besoin de description complète, vous trouverez vous-mêmes en pratiquant.

Variante : j’entre à l’intérieur en menaçant le visage de Uke. Mon bras continue son mouvement circulaire et vient saisir la main de Uke en pronation, pouce sur pouce, petit doigt sur petit doigt... N’oubliez pas de veiller constamment à votre sécurité.

Et ça vous dirait, un petit Kaeshi Waza en enchaînement ? Je place donc Kote Kudaki. Quand la clé est verrouillée, l’ensemble bras, avant-bras, poignet de Uke forme un Z et mon coude exerce une pression sur son coude pour le diriger vers le sol. J’accentue cette pression en l’accompagnant de pas glissés latéraux qui le contraignent à s’agenouiller. Je bascule son coude vers le haut en exerçant une traction du poignet vers l’avant pour l’amener à plat ventre. C’est là que commence le jeu du chat et de la souris... Ma main libre vient prendre le relais de l’autre, en supination, pouce sur pouce, petit doigt sur petit doigt, je pousse le bras vers l’avant de sorte que le coude dépasse l’épaule : Yuki Chigae au sol ! Une petite accentuation de la clé permet de contraindre le bras de Uke à monter à la verticale, ce qui l’oblige à se relever sur la pointe des pieds... Un petit lancer vers l’avant le fait basculer, une traction latérale amène le coude au niveau de ma hanche, une petite poussée  accompagnée d’une accentuation de la clé le conduit à plat ventre... Immobilisation ou prolongation du jeu du chat et de la souris, tout dépend de votre humeur.

 

Gyakute Dori. Au moment où Uke tente de l’emmener, Tori déplace son poids sur la jambe arrière pour éviter d’être déséquilibré puis pivote pour porter Mawashi Geri (à ce propos, qui pratique encore le Keri Goho ? Le niveau de pratique des coups de pied, de Mawashi Geri en particulier, est largement en retrait du niveau... débutant !) . Simultanément, sa main libre vient percuter le poignet de Uke. Deux opportunités se présentent :

-          utiliser le mouvement induit par Mawashi Geri pour passer sous le bras de Uke puis placer Yuki Chigae

-          percuter en pronation le dessus de la main de Uke pour dégager la main saisie, continuer comme pour placer Ura Ude Nage et enchaîner Yuki Chigae

 

Dosokute Dori. Pas latéral sur l’extérieur pour déstabiliser Uke latéralement. Petite rotation du poignet comme pour porter Kote Kudaki, reprendre le tranchant de la main de Uke, l’autre main vient se placer en appui côté pouce : se place ainsi un demi Yuki Chigae. C’est peut-être l’occasion de contrôler les compétences en Yoko Ukemi.

 

Ushiro Eri Dori. A priori, je suppose que je suis saisi de la main droite. J’avance la jambe droite en tirant mes deux revers pour bloquer les doigts de Uke contre ma nuque. Je passe sous le bras de Uke avec un grand Nagashi pied avant. Je contrôle la main de Uke avec ma tête et je saisis sa main avec ma main gauche en supination. La main droite vient prendre sa place. Immobilisation. Projection avant, projection arrière, au choix...

 

Deux heures sont vite passées. La migraine naissante a laissé place à un sourire permanent. On apprend aussi en jouant. Regardez les canidés qui jouent quasiment jusqu’à leur dernier souffle... Quels combattants ! Nous ne sommes pas des canidés, les humains ont besoin d’être régulièrement recadrés mais trop de rigueur crée des robots ! Notre Art a pour but de nous libérer, pas de nous enfermer.

 

Pas de fiche technique, pas de considérations pédagogiques, je me suis contenté de décrire le déroulement d’un cours. En ce qui concerne les considérations et digressions « philosophiques », elles font partie du jeu : à ne pas prendre au sérieux mais à étudier sérieusement...

 




Une spectaculaire application de Yuki Chigae :

observez bien, ça va vite.

Je suis d’accord avec vous, c’est une belle animation,

encore un domaine où j’ai un certain talent.



 

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16 février 2009 1 16 /02 /février /2009 10:00

L’hiver, qui a décidé de retrouver sa vigueur passée au lieu de se comporter en automne prolongé comme il l’a fait depuis quelques années, a contrarié mon calendrier. Quelques centimètres de neige et les routes aux revêtements trop lisses se transforment en patinoires...

 

Au lieu de se dérouler dans une ambiance de froid sec, le cours a dû s’adapter à un temps frais et humide. Les kimonos n’ont pas tardé à s’imprégner de sueur. En effet, je profite de mon déplacement au Dojo pour programmer une séance de Kobudo avec mon amie Jocelyne. Je répète assidûment tous les katas 2 fois par jour. Seul, il est difficile de se concentrer sur les sensations mais la chorégraphie se met bien en place pour peu qu’on parvienne à visualiser un partenaire. Cet entraînement m’apporte une exigence de rigueur que je pourrais avoir tendance à mettre de côté au fur et à mesure que les années passent. Nous avons le privilège de pratiquer un Art merveilleux, évolutif... C’est pourquoi il est nécessaire d’exécuter régulièrement et humblement les grands Katas traditionnels. Ils nous rappellent qu’on peut toujours mieux faire.

 

D’autres élèves nous ont rejoints bien avant l’heure du cours et ont travaillé leur Aïkibudo, ce qui fait que toutes les articulations, tous les muscles étaient convenablement chauds et assouplis au commencement effectif du cours.

 

Théoriquement, il est possible de faire tout sur tout même si tout ne paraît pas nécessairement pertinent. Le passage de la distance Chika Ma à la distance Ma apporte l’ensemble des sensations et de la mobilité qui permettent d’expérimenter cette théorie.

Le dernier cours avait été construit autour de l’exploration des possibilités d’application de Kote Gaeshi. Cette fois-ci, c’est Shiho Nage qui est mis en œuvre.

 

Point de départ : Jyunte Dori en distance Chika Ma.

Le Te Hodoki appliqué à cette saisie démontre avec presque trop d’évidence la théorie, le même geste autorise aussi bien l’application de Kote Gaeshi que de Shiho Nage, seule le repositionnement de la main saisie après le dégagement conditionne la technique choisie, encore que Shiho Nage puisse être porté soit avec cette main en supination, c’est la forme « logique », soit avec cette main en pronation, c’est une forme « possible », essayez vous-mêmes. J’en reparlerai plus loin.

Le passage à la distance Ma conditionne le Tai Sabaki en fonction des notions de techniques extérieures ou intérieures. Fondamentalement, Shiho Nage est classé dans les techniques fondamentales intérieures (on dira : entrée intérieure comme Shiho Nage...). Une entrée intérieure expose Tori à une attaque venant de la main libre de Uke. L’atémi au visage, Yokomen Uchi (en fait, il s’agit de porter une attaque circulaire qui permet une forte poussée de l’avant-bras sur la clavicule de Uke et se prolonge en atémi sous l’oreille) est indispensable, il provoque un réflexe de défense de Uke qui protège son visage et, porté avec détermination, provoque un déséquilibre arrière. Il devient alors possible de faire passer le bras saisi par devant et de placer la technique.

Point-clé : le bras de Uke subit une traction continue de l’entrée du mouvement à la projection. Cette traction s’effectue dans un plan horizontal jusqu’à ce que sa main rejoigne son épaule (une rupture du plan ouvre la voie au Kaeshi Waza). À ce moment, une traction du poignet place le bras dans le plan vertical, contraint Uke à se cambrer et permet la projection. Tori peut accompagner cette traction d’un léger recul du pied avant qui lui permet de se replacer de façon optimale.

 

Applications pratiques

Dosokute Dori : le passage de la distance Chika Ma à la distance Ma ne doit pas poser de problème. A priori, Tori effectue Nagashi pied avant. La mise en déséquilibre de Uke s’initialise au moment où il pose le pied avant.

Ryote Ippo Dori : il s’agit d’une double saisie, Jyunte Dori plus Dosokute Dori. C’est l’occasion d’aborder les notions d’Irimi et Tenkan. L’expérience montrera qu’il ne s’agit pas d’un choix personnel mais que la forme choisie peut être déterminée par le pied avant de Uke suivant qu’il tente de saisir comme Jyunte Dori ou comme Dosokute Dori... Encore une piste à explorer...

Muna Dori : le dégagement s’effectue en fonction de la technique envisagée. Pour Shiho Nage, dans l’hypothèse où Uke saisit de la main droite, Tori saisit son revers de la main gauche, sous la main de Uke dont il saisit le poignet avec sa main droite, pouce en l’air. Dégagement avec une double torsion accompagnée d’une puissante rotation des hanches vers la droite.

Le passage à la distance Ma ne réinvestit pas cette spécificité, Tori ne doit pas se laisser saisir et son Tai Sabaki s’effectue par l’intérieur. Application des formes Irimi et Tenkan.

Ushiro Eri Dori : cette forme a déjà été abordée à l’occasion de la présentation d’une classification en techniques intérieures ou extérieures et de « paires symétriques »... Uke saisit de la main droite. Tori saisit ses deux revers pour bloquer les doigts de Uke contre sa nuque et avance la jambe gauche, pied vers l’intérieur, en tirant le bras de Uke. Il reprend ses deux revers de la main gauche, pivote en passant la tête sous le bras de Uke dont il saisit le poignet par-dessous (en supination). Il ramène ce bras vers l’avant et porte Shiho Nage.

 

Shiho Nage se porte classiquement sur Omote Yokomen Uchi. C’est quasiment un automatisme. Portez Omote Yokomen Uchi, la réponse sera Shiho Nage. Demandez Shiho Nage, l’attaque la plus fréquente sera Omote Yokomen Uchi !

Théoriquement, tout est possible sur tout. La dernière fois, nous avons appliqué Kote Gaeshi (technique extérieure) sur Omote Yokomen Uchi. Cette fois-ci, nous porterons Shiho Nage (technique intérieure) sur Ura Yokomen Uchi.

Uke attaque Ura Yokomen Uchi du bras droit. Tori, en Migi Kamae, effectue Irimi pour contrôler l’attaque, tranchant de la main gauche dans le pli du coude, tranchant de la main droite au pli du poignet. Il saisit le poignet de Uke, avance la jambe gauche en poussant son coude vers l’avant, pose sa main gauche contre sa main droite et porte Shiho Nage en exerçant une contrainte avec son avant-bras sur l’avant-bras de Uke. Observez la position de la main gauche... Certes, elle n’est pas académique mais puisqu’on vous dit que, théoriquement... et que se passe-t-il si, au moment de l’entrée, Tori avance le pied gauche ?

 

Randori : Shiho Nage sur toutes attaques et toutes saisies. Tori ne doit jamais se sentir déstabilisé parce qu’il avait prévu d’appliquer une technique et que l’attaque subie n’est pas conforme au type d’attaques attendues.

Et oui, encore une autre forme d’entrée...

On n’a jamais fini...

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9 janvier 2009 5 09 /01 /janvier /2009 11:27

Ce premier cours de l'année est construit sur un nouveau thème : on doit pouvoir faire tout sur tout...

Loin de moi l'amorce de l'idée qu'on peut faire n'importe quoi. En clair, il doit être possible, avec un minimum d'imagination et de réflexion, d'effectuer toutes les techniques sur toutes les attaques, saisies ou atémis.

Bien sûr, certaines réponses seront pertinentes, d'autres le seront moins voire pas du tout. L'important est de s'habituer à être toujours présent, vigilant et capable de s'adapter quelle que soit la situation. À l'occasion d'un examen ou au cours d'un randori. En gardant à l'esprit qu'il y a des formes de base, des variantes et... des possibilités.

L'idéal est de s'intégrer au mouvement et de porter la technique qui naît de ce mouvement. Or, le plus souvent, face à une attaque, on a le réflexe de tenter d'appliquer une technique « codifiée » qui correspond à la forme de l'attaque : à une attaque impliquant une entrée intérieure on répond avec une technique classée intérieure... sachant que toute règle connaît ses exceptions. Mais si l'attaque attendue ne correspond pas à celle qui survient, la technique « codifiée » prévue ne peut plus se porter et Tori se retrouve momentanément déstabilisé.

Les règles qui permettent d'éviter de commettre des erreurs ne doivent pas devenir des carcans qui empêchent toute expression « libre ». Encore une fois, il n'est pas question de faire n'importe quoi. Il existe un esprit, sinon une philosophie, de l'Aïkibudo. Not' bon Maître me disait qu'une technique est bonne si elle est esthétique et efficace. On parlait alors de forme de corps. Plus tard s'est imposé le concept de mouvement, qui définit au mieux cet esprit de l'Aïkibudo. Et not' bon Maître  dit qu'aucune technique n'appartient à un art martial en particulier. On retrouve Kote Gaeshi dans la plupart d'entre eux mais il n'est pas partout porté avec la même intention, la même finalité. En Aïkibudo,  il est l'aboutissement, le point final du mouvement. Il n'a pas été décidé au départ de porter Kote Gaeshi mais c'est Kote Gaeshi qui s'est présenté dans le déroulement du mouvement...

Une technique de Judo portée dans l'esprit de l'Aïkibudo devient technique d'Aïkibudo. Pour vous en convaincre, je ne saurais trop vous recommander de regarder les vidéos du très grand Maître Kyuzo Mifune. Rendez-vous à cette adresse : http://fr.youtube.com/watch?v=pUIOII3PWUc et faites-vous plaisir, regardez-les toutes. « Bien plus proche de ce que l'on fait que ce que l'on voit sur les films de M. Ueshiba. Ça donne envie de faire du judo ! » m'a dit Christophe qui me les avait recommandées. Il ne savait pas que ce grand Maître avait été le professeur de Minoru Mochizuki.

Dans le cadre du projet de ce second trimestre, il s'agira d'appliquer les techniques fondamentales (Kote Gaeshi, Shiho Nage, Yuki Chigae, Mukae Daoshi, Hachi Mawashi, Kote Kudaki...) sur toutes les saisies en distance Chika Ma puis en distance Ma. Le passage entre ces 2 distances a été le thème du projet du 1er trimestre.

Kote Gaeshi se prête bien à une première approche puisque qu'il découle souvent  directement du Te Hodoki.

Jyunte Dori : application de la forme de base en distance Chika Ma. Les points clés ont déjà été décrits dans des fiches précédentes.

En distance Ma, l'armlock est de rigueur. Le plus facile à appliquer consiste à contraindre le bras de Uke contre le flanc. Une forme plus délicate consiste à contraindre le bras de Uke avec le coude. C'est la position de Tori par rapport à Uke qui déterminera son choix.

Une variante intervient si, au lieu de contraindre Uke vers le sol (le « fer à repasser... »), Tori l'entraîne devant lui comme pour porter une technique « intérieure », il peut avoir l'opportunité de porter Kote Gaeshi. Il suffit de bien placer les mains.

J'ai choisi Kote Gaeshi qui permet de contraindre Uke à effectuer une roulade arrière. Ce choix est dû aux conditions météo : le froid ambiant rend le corps plus fragile. Les chutes dites plaquées deviennent corrosives pour l'organisme.

Cette démarche est applicable sur toutes les saisies de face, formes fondamentales et variantes.

Les saisies arrière proposent une autre démarche. En effet, comment concevoir la distance Ma sur ce type de saisies ? Il faudra donc orienter sa recherche sur 2 formes de sorties.

Exemple avec Ushiro Uwate.

Première forme de sortie : simultanément, lancer une jambe entre les jambes de Uke et relever les bras, main sur main, au-dessus de la tête, tourner les hanches du côté de la jambe arrière, repousser Uke latéralement, se dégager, armlock, Kote Gaeshi.

Seconde forme de sortie : contrôler la main « en dessous » avec le tranchant de la main homologue, glisser les hanches sous le bras « au dessus », saisir le poignet de la main contrôlée, entraîner Uke, porter Kote Gaeshi...

Ça ressemble à une recette de cuisine. Les élèves ont commencé à saturer, je ne les avais pas habitués à un tel rythme d'acquisition : pas le temps de réfléchir à la forme que déjà il fallait passer à la suivante ! Je leur ai conseillé de prendre des notes. Quelqu'un m'a répondu que ce n'était pas la peine, il suffisait d'attendre la publication de mon article... Hélas, comment décrire des sensations ? Comment décrire clairement, tout simplement ? Un mouvement ne se vit pas de la même façon qu'on applique une recette !

Je ne peux donc que vous proposer des pistes. À vous de les explorer en fonction de vos connaissances, de votre bon sens, de vos sensations. Le randori, s'il est pratiqué avec sincérité, permettra de faire le tri.

 

 

 

 

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6 décembre 2008 6 06 /12 /décembre /2008 11:44

 

 

Mon projet est toujours d’approfondir les notions contenues dans le thème du « Chika Ma en mouvement » c’est-à-dire du transfert des sensations acquises lors de la pratique initiale du Chika Ma vers la pratique effective de l’Aïkibudo, la distance Ma.

Pour appuyer et valider mes choix, quel meilleur soutien que celui du DTN adjoint, Alain Roinel, qui écrit les lignes suivantes :

 

J’ai fait le constat souvent répété d’une incapacité de nos jeunes à exploiter la saisie en Ma. À chaque fois, nous voyons la saisie transformée comme dans la distance Chika Ma et de ce fait l’obligation pour le candidat de pratiquer un Te Hodoki.

Certes, l’étude des Te Hodoki est indispensable pour maîtriser le dégagement et pour la bonne forme de corps qui s’y trouve appliquée ainsi que son corollaire : la mise en déséquilibre indispensable de Uke.

Cette notion devrait être quasi facilitatrice pour la distance Ma, mais apparemment, ce n’est pas vécu comme ça.

Pourquoi ? Sûrement parce que nous n’apportons pas tout le soin nécessaire dans notre enseignement à cet aspect de la progression.

 

Chika Ma : on part d’une position statique, codifiée. Tori doit mettre Uke en mouvement de façon à créer le déséquilibre qui offre l’opportunité d’une technique. C’est le Machi no Sen (attendre pour réagir)

Ma : Uke initialise le mouvement en avançant pour saisir. Tori doit entrer dans ce mouvement et l’utiliser pour placer sa technique (ou plutôt pour permettre à la technique de se placer ?). C’est le Tai no Sen (agir en même temps que l’adversaire).

 

Les sensations acquises lors de la pratique initiale du Chika Ma sont transférées vers la pratique effective de l’Aïkibudo, la distance Ma. En conséquence, on doit exiger la garde, la stabilité, le placement de la force, les contraintes exercées sur Uke. Ni brutalité ni travail éthéré... L’Aïkibudo se place au juste milieu, dans un subtil équilibre acquis en travaillant les bases. LES BASES.

J’ai toujours soutenu, et je suis heureux d’entendre not’ bon Maître l’affirmer, le confirmer haut et fort à chaque stage des Cadres, que le programme du 1er dan se suffirait à lui-même pour permettre la progression de toute une vie sur la Voie de l’Aïkibudo. Si ce programme est parfaitement maîtrisé, on découvre que toutes les autres techniques sont des adaptations, des « sophistications » de connaissances déjà acquises.

J’aime bien raconter que mes meilleurs élèves (c’est-à-dire tous mes élèves...) ont préparé leur 2ème, 3ème, 4ème dan en 2 ou 3 dimanches matin... Il faut préciser qu’ils ne s’étaient pas contentés de 2 petits cours hebdomadaires bien tranquilles. C’était l’aboutissement d’un travail intense, exigeant, 4 ou 5 fois par semaine, sans oublier les nombreux stages régionaux ou inter-régionaux. Tout se mérite, tout se gagne.

Rechercher avec boulimie à acquérir le contenu d’un gros catalogue de techniques, la quête obsessionnelle du contenu d’un programme consiste à bâtir un gratte-ciel sur du sable, ça ne tient pas debout. Il ne restera plus, pour voiler l’incompétence, que la pratique du secret : il sera interdit, à ceux qui « n’ont pas le niveau » de voir certaines techniques réservées aux experts. Restera aux experts à se persuader qu’ils sont experts... en se cachant ?

 

Déroulement du cours : du Chika Ma au Ma

 

Préparation

Échauffement classique.

Contrôle de la maîtrise de la chute : roulades avant et arrière, enchaînements, progression vers la notion d’Ukemi.

Contrôle de la maîtrise du Tai Sabaki : application de O Irimi sur Tsuki Chudan en même garde et en garde inversée (vers les notions d’entrée intérieure ou extérieure).

 

Étude technique

Point de départ : saisie en Jyunte Dori.

Révision des points-clés du Te Hodoki.

Application de Kote Gaeshi (flexion et torsion)

-          Kote Gaeshi proprement dit : c’est un renversement par flexion du poignet. Te Hodoki, contrainte par brossage de l’avant-bras, renversement par rotation du bassin.

-          Neji Kote Gaeshi : c’est une évolution de Kote Gaeshi par extension du bras, la flexion se transforme en torsion. La distance entre Tori et Uke est plus grande, la rotation du bassin évolue en Tai Sabaki.

 

Chika Ma : les contraintes sont importantes (dégagements, action sur l’avant-bras, renversement ou torsion)

Ma : il n’y a plus de saisie mais tentative de saisie

-          Tori « conduit » Uke comme en Chika Ma sans se laisser saisir et en effectuant Nagashi.

-          Quand il reprend le poignet de Uke, il lui place le coude en contrainte contre son flanc, opportunité d’un armlock exécuté avec une flexion du genou correspondant

-          La technique s’effectue par un retour du bassin et une flexion de l’autre côté.

-          À titre éducatif, poser le genou au sol à chaque flexion.

 

Le placement de Neji Kote Gaeshi va impliquer un « grand »Tai Sabaki qui va placer Tori à la distance convenable. De façon simpliste, on pourrait dire qu’un « petit » Nagashi met en place Kote Gaeshi et qu’un « grand » Nagashi offre l’opportunité de Neji Kote Gaeshi.

Les sensations acquises en Chika Ma sont ainsi réinvesties dans l’évolution en distance Ma.

Problème de la chute avec Neji Kote Gaeshi : la peur, la maîtrise insuffisante de l’Ukemi  peuvent être cause de blocage ou de blessure. Je propose 2 approches sécurisantes :

Cas « grand débutant »

-          Tori effectue un Nagashi pied avant et pose le genou extérieur au sol

-          Il conduit le poignet de Uke sur son genou relevé

-          Uke prend appui avec sa main libre sur le poignet de Tori

-          Il effectue une roulade avant par-dessus le genou de Tori, tête tournée vers l’intérieur

-          Tori soulève légèrement le poignet « torsion » de Uke pour conduire sa chute

 

Cas « débutant initié »

-          Tori arrête son mouvement juste avant de provoquer la chute de Uke

-          Uke vient prendre appui avec sa main libre sur le poignet de Tori

-          Tori continue son mouvement et provoque la chute de Uke

-          Uke effectue sa chute, tête tournée vers l’intérieur

-          Tori contrôle la chute en maintenant le poignet de Uke à hauteur de sa hanche

 

Application de Yuki Chigae

L’étude de Kote Gaeshi en distance Ma avait ouvert le concept d’armlock « par dessus ». L’étude de Yuki Chigae va amener au concept d’armlock « par dessous ».

-          Chika Ma : application du Te Hodoki. Pour mettre Uke en mouvement, Tori effectue un pas latéral vers l’extérieur en appuyant la tête dans le pli du coude de Uke puis, en se relevant, le pousse sur son avant. De sa main libre, il reprend le tranchant de la main de Uke (pouce sur l’articulation du pouce, petit doigt en crochet sur l’articulation du petit doigt) et la remonte de façon à placer le coude au-dessus de l’épaule tout en effectuant une torsion vers l’intérieur. La main qui tient le poignet vient saisir les doigts et effectue une poussée du coude vers l’avant. Cette combinaison de torsions doit contraindre Uke à monter sur la pointe des pieds.

-          Ma : Tori « conduit » Uke comme en Chika Ma en effectuant un grand Nagashi pied avant. Ce faisant, il place son bras libre en arc-boutant en posant sa main sur sa hanche. Le coude de Uke est ainsi placé en appui sur l’arc-boutant et subit un armlock qui le contraint au déplacement. La technique se conclut comme précédemment.

 

Application de Shiho Nage

Kote Gaeshi et Yuki Chigae initient à l’entrée par l’extérieur. Shiho Nage introduit la notion d’entrée par l’intérieur. Le Te Hodoki apporte une vision restrictive des entrées puisque le dégagement est le même pour les 3 techniques. Toutefois le positionnement des mains et l’action sur le bras sont différents et doivent sensibiliser au sens de l’entrée en distance Ma.

-          Chika Ma : application du Te Hodoki, torsion extension du bras poussé vers l’avant, la 2ème main vient se placer, paume en l’air, à côté de la 1ère de façon à accentuer la torsion. Passage sous le bras, tangentiellement à Uke, sans relever son bras. La main de Uke est ramenée contre son épaule. Une action sur le poignet, accompagnée d’un retrait du pied avant doit provoquer le renversement de Uke. Le pied se replace pour accompagner la chute.

-          Ma : entrée intérieure. Mise en sécurité : atémi du tranchant de la main. Le mouvement induit par cet atémi permet de reprendre le poignet de Uke. L’application de la technique est analogue à celle portée en Chika Ma.

 

Application de Hachi Mawashi.

C’est une technique plutôt méconnue. Est-elle couramment enseignée en dehors du Kihon Nage Waza Shodan ?

C’est l’occasion d’évoquer son évolution historique. Le Hachi était le rebord du casque, un peu comme celui du casque des « Tommies » pendant la guerre de 14/18. Saisir ce rebord et effectuer une rotation entraînait la rupture des cervicales. Cette technique, très dangereuse, a évolué. Tout en gardant la cinétique originelle, elle ne présente plus de risques pour celui qui la subit, même avec un partenaire brutal ou maladroit.

Le contrôle étroit de la tête de Uke et le Tai Sabaki très tangentiel permettent de provoquer le renversement. Ces 2 points techniques sont souvent insuffisants faute de détermination.

 

Application 

Randori Jyunte Dori distance Ma.

 

En conclusion, une piste de travail.

On doit être capable d’effectuer n’importe quelle technique sur n’importe quelle saisie, voire sur n’importe quelle attaque. Bien évidemment, certaines formes seront pertinentes et d’autres non. Toutefois, le jeu intellectuel mis en œuvre permet de ne jamais se retrouver pris au dépourvu, ce qui est malheureusement souvent le cas des candidats aux examens, quel que soit le grade convoité. Et envisager d’appliquer Kote Gaeshi sur Omote Yokomen Uchi ou Shiho Nage sur Ura Yokomen Uchi aurait fait hurler les puristes il y a quelques décennies... Techniques extérieures, techniques intérieures, certes, avec rigueur, mais si toute règle doit être parfaitement connue et appliquée, il faut en connaître les exceptions.

Et encore ce conseil : Je me rappelle que mes Maîtres me conseillaient d’appliquer chaque technique comme si c’était la dernière... quitte à finir, autant finir en beauté, avec panache... n’est-ce pas le sens du Sutemi ?



 

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7 novembre 2008 5 07 /11 /novembre /2008 12:35

Les 10 fidèles habitués sont présents à ce second cours de la saison. Le thème court toujours autour du Chika Ma ; le Te Hodoki de la saisie avant à la saisie arrière, de la distance Chika Ma à la distance Ma.

Ce thème récurrent amène plusieurs remarques. Il a été au cœur des réflexions lors du dernier séminaire des Kodansha. Le travail en Chika Ma, et le Te Hodoki en particulier, est une spécificité de notre école. Il représente le socle sur lequel se construira l’ Aïkibudo qui est l’Art du Mouvement.

Ce type de travail peut présenter une image statique qui n’en est qu’une interprétation fausse. Le mouvement existe à l’intérieur du Te Hodoki et de la technique portée en distance Chika Ma :

-         esquive, le Tai Sabaki est effectué avec un minimum de déplacement des pieds, grâce à la mobilisation du bassin

-         mouvement, Uke est contraint à se déplacer et est placé en déséquilibre

Outre ces éléments, les saisies avant mettent l’accent sur la mise en sécurité, la précision des actions et la vigilance.

Les saisies arrière apportent une nouvelle sensation, la capacité d’adaptation due au fait que Tori ignore d’où vient l’attaque. Le mouvement induit est déjà une transition entre la distance Chika Ma et la distance Ma.

Un travail répétitif et mécanique sur des formes de travail connues, donc attendues, crée des réflexes, donc un conditionnement. Un réflexe induit automatiquement une réponse B à une attaque A sous réserve que cette attaque soit conforme à l’attente, c’est-à-dire à la forme scrupuleusement travaillée. Mais s’il se produit une situation inattendue, par exemple une attaque A1, la réponse B se révèlera inefficace. Tori risque alors de se livrer à une gesticulation brouillonne ou de rester dépourvu de réaction...

Il ne s’agit pas de créer des réflexes mais de développer l’aptitude à s’adapter. Ouvrir son angle de vision, élargir son champ d’activité, accepter de sortir d’un formatage rassurant. L’aspect statique ne se situe pas que dans l’expression corporelle, il se situe d’abord dans la tête. Sous forme de préjugés ?

 

Déroulement du cours :

 

-         échauffement : les Te Hodoki avant (Jyunte Dori, Gyakute Dori, Dosokute Dori, Ryote Ippo Dori (Jyunte + Dosokute portés sur le même poignet), Ryote Dori (double Jyunte)

 

-         développement de Muna Dori : (sur saisie main droite)

-         point clé : prendre les 2 pans de son col sous la main de Uke

-         saisie du col de la main gauche, léger Hiraki vers la gauche, engagement du bras droit sous le bras de Uke, attaquer ce bras avec le coude (vers Mukae Daoshi)

-         pied gauche en avant : main gauche en pronation, main droite saisissant le col, rotation du bassin pour repousser le bras de Uke (vers Kote Gaeshi)

-         pied droit en avant : main droite en supination, main gauche saisissant le col, rotation du bassin pour repousser le bras de Uke et rotation en sens inverse (vers Shiho Nage)

 

-         développement de Ushiro Eri Dori (transfert des éléments propres à Muna Dori)

 

-         point clé : faire un pas en avant en bloquant les doigts de Uke contre la nuque en tirant les 2 pans du col.

-         hypothèse de travail : Uke a saisi de la main droite, Tori avance le pied gauche, pied légèrement en dedans. Rotation du bassin, reprise des 2 pans du col avec la main gauche, le coude droit de Tori attaque le bras de Uke au-dessus de son coude, dégagement, Mukae Daoshi

-         variante : Uke a saisi de la main gauche. Après avoir pivoté, Tori ne se retrouve pas dans la situation attendue. Atémi au visage, passage sous le bras de Uke, permutation des mains et suite comme ci-dessus.

-         pronation ou supination ? Sous réserve de ne pas bloquer le mouvement naturel du corps :

-       si je lève le bras homologue à la jambe qui avance, au cours de la rotation du bassin la main se place en pronation

-       si je lève le bras opposé à la jambe qui avance, au cours de la rotation du bassin la main se place en supination...

-         j’en déduis les implications techniques suivantes (Uke saisit de la main droite) :

-         pied gauche + main gauche = Kote Gaeshi

-         pied gauche + main droite = Shiho Nage

-         pied droit + main droite = Robuse

-         pied droit + main gauche = Yuki Chigae

-         Uke saisit de la main gauche...

 

-         Randori

 

 

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